Les mains dans le moteur : restauration d'une Framus Strato Deluxe

La Framus Strato Deluxe est un modèle riche de nombreuses variantes au catalogue Framus, et en ayant restauré plusieurs, je me suis dit qu’une présentation des étapes d’entretien et de ce qu’on pouvait rencontrer pourrait vous intéresser.

La Strato Deluxe a été produite entre 1963 et 1969 et elles ont été disponibles sous différentes finitions, mais aussi avec des câblages différents, intégrant ou non un « organ effect » (sorte de potentiomètre de violoning équipé d’un ressort), de commutations d’inversion de phase ou de tonalité additionnelles. Elles comportaient de série un étouffoir à cordes à bascule, fixé au chevalet.

Il m’est néanmoins arrivé de rencontrer de vraies catastrophes. Voici donc une petite galerie en mode « avant/après » des Strato Deluxe que j’ai eu la chance de restaurer.

Le manche

Avant
Après

Leur manche, typique de la marque était taillé dans un contreplaqué structurel de hêtre collé à la résorcine et ces manches ont en général très bien vieilli et sont resté très stables. Le renversement de la tête est réalisé avec un scarf (coupe oblique) mais dans le cas présent le collage avait été repris à la super glue et avait cassé, après collage j’ai refait la finition du manche.

Pour faciliter la jouabilité de ces guitares, j’ai souvent remplacé les mécaniques d’origine qui, même après désoxydation des engrenages et taille d’un sillet neuf, ne conservaient pas une tenue d’accord fantastique, ce qui est aussi dû au combo vibrato/chevalet vintage.

Les sillets

Avant
Après

La Framus Strato Deluxe, comme toutes les Framus avant 1970 comporte une frette zéro, mais celle-ci use et il faut parfois la remplacer. Les sillets ont pu être manipulés aussi pendant la longue vie de la guitare et on peut trouver des pièces qui n’ont pas été ajustées. Ici un sillet en plastique quelconque.

Après avoir changé la frette zéro, taillé un sillet en os et refait un cache truss rod, la guitare va déjà mieux. Dans la mesure du possible je laisse les traces de l’âge respectable de ces nobles dames en conservant la peinture d’origine que je me contente de nettoyer et polir.

L'action

Avant
Après

Il va sans dire qu’après recollage de la tête, refrettage, réglage du manche, taille d’un sillet etc… on peut passer d’un arc à un instrument de musique jouable…

L'électronique

Avant
Après

Les micros bobinés par Schaller sont dignes de la qualité légendaire allemande, car, complètement enfermés dans une coque de métal riveté, ils sont quasiment indestructibles. Leur faiblesse peut venir du câblage plutôt exposé qui ici est dénudé et en contact avec le capot, créant un court-circuit à la masse. Après démontage, réparation et remontage on retrouve les 10 à 11 kΩ de résistance qui en font des micros très puissants pour l’époque.

Avant
Après

J’ai vu des câblages qui n’avaient pas été manipulés, mais dont les condensateurs paper-in-oil d’origine étaient complètement secs et qui comportaient de nombreuses boucles de masse. J’ai aussi vu des câblages « restaurés » par des bricoleurs avec ce qui leur tombait sous la main, autant dire qu’il est inutile d’essayer de laisser ça en l’état et qu’il est beaucoup plus fiable de repartir à neuf tout en rationalisant le plat de nouilles ! Quand je le peux je conserve les potentiomètres d’origine, mais parfois je n’ai pas le choix que de tout remplacer. Il m’est aussi arrivé de démonter et réparer les sélecteurs à glissières pour les conserver.

Les finitions

Avant / Après
Avant / Après

L’accastillage de ces guitares est principalement en métal, mis à part le pickguard en celluloïd (il dégage une odeur de menthol typique quand on le polit). Souvent sales, les chromes de l’époque étaient néanmoins très résistants et après polissage paraissent comme neuf ! Les versions « Gold » ont en général moins de chance…

Avant
Après

Les boutons de potentiomètres étaient choisis en fonction des stocks disponibles et je ne pense pas en avoir trouvé 2 sets identiques sur les guitares croisées. Pour celle-ci, des boutons blanc, il devait y avoir une capsule en métal collé dessus à l’origine. J’ai recréé cet aspect en collant des pastilles d’aluminium poli.

Il est passionnant de travailler régulièrement sur ces guitares, chaque modèle rencontré ayant sa personnalité, ses petites spécificités et ses plus ou moins gros problèmes. Mais ce sont des guitares agréables à jouer et avec un vrai caractère vintage à des tarifs abordables. Elles ont souvent beaucoup joué et ont un passé chargé d’histoire, de pocs, d’usure, de tentatives de réparation…

Mais ce qui me plait le plus c’est de ressentir une certaine humilité face à des instruments qui ont traversé 5 décennies et sont encore là pour témoigner de l’inventivité dont faisait preuve les fabricants de guitares de cette époque ! C’est très riche d’enseignements !

L'auteur : Gildas DasViken est ingénieur-luthier de père en fils depuis décembre 2013. Il lance son entreprise à Nantes avant de s'installer en centre-Bretagne où il fabrique désormais des guitares éco-responsables, aux finitions naturelles en utilisant des matériaux de récupération et des composants made-in-France

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