Tour de France : À la rencontre de « Jacques Pedals »

Né au début des années 1960, Jacques Charbit, a su se faire un nom dans le milieu des effets customs avec ses pédales « Jacques Pedals » distribuées maintenant aux quatre coins de la planète.

Installé dans la ville de Marseille depuis toujours, l’atelier de Jacques est un véritable lieu de pèlerinage pour tout amateur en quête de matériel vintage et de sonorités uniques. À l’occasion de la réédition de l'incontournable « Bat Fuzz », Jacques Charbit a bien voulu répondre à nos questions.

Jacques Pedals existe depuis maintenant plusieurs années, comment est née la marque ?

Jacques Charbit

Je suis tombé dedans très jeune. À 13 ans, je fabriquais déjà mes premières pédales d’effet. Au milieu des année 90, je suis tombé sur un article de magazine qui parlait des effets un peu passés de mode. Il faut bien comprendre qu’à cette époque les pédales en tant que telles n’étaient plus recherchées, les musiciens voulaient pratiquement tous des multi-effets.

C’est ce qui m’a donné l’idée de refaire des pédales comme quand j’étais jeune et de pouvoir, grâce à internet, les proposer aux musiciens intéressés. J’ai créé un site qui parlait à la fois des pédales vintage et de mon travail. C’est comme ça que j’ai pu dès 1999 vendre mes premiers effets jusqu’aux États-Unis.

Comment est-ce que vous avez appris à fabriquer des pédales d’effet ? Vous avez une formation dans le domaine de l’électronique ?

De par mes études, j’ai une formation de physique théorique, mais j’ai surtout appris l’électronique grâce à des petits bouquins qu’on trouvait au début des années 1970 dans tous les bons magasins d’électronique.

Magazine « Radio Plans » des années 70

C’étaient des ouvrages de vulgarisation à destination de ceux qui voulaient créer leurs propres radios ou effets pour guitare par exemple. On trouvait ça facilement dans les boutiques d’électronique, il y en avait beaucoup.

C’était la grande mode et le hobby de beaucoup de personnes. Bien sûr, ma formation en physique me permettait de développer mes circuits et de réaliser les calculs pour fabriquer mon propre matériel.

Avant que tout ne soit disponible sur internet, il devait être difficile de recréer certains effets ?

Complètement. On avait des sortes de « maître Yoda ». Je connaissais deux trois personnes qui étaient dans l’électronique depuis longtemps et qui pouvaient m’expliquer des choses en lien avec la partie technique de la fabrication.

Les petits livres de vulgarisation étaient également très utiles pour décrypter certains effets et montages, tout comme les magazines comme l’antique « Radio Plans » que tous les amateurs de l’époque connaissent bien.

Quels étaient les premiers effets que vous proposiez ?

La « Fuse Blower »

La toute première pédale que j’ai développée, c’était la Fuse Blower, je la fabrique toujours à la main. C’est également ce premier modèle que j’ai décidé de faire fabriquer en série par une autre entreprise de façon industrielle.

Pour la petite histoire, les premiers boîtiers pour mes effets étaient créés par une entreprise qui fabriquait des valises de transport en métal pour les perceuses et tout un tas d’outils électroportatifs. J’en ai d’ailleurs toujours un stock que j’utilise pour toutes les pédales que je fabrique encore à la main.

Vous avez été rapidement remarqué par des musiciens de l’autre côté de l’Atlantique, vous pouvez me parler de cette époque ?

Chris Whitley et Jacques Charbit

J’ai très vite eu un site internet qui m’a donné une visibilité en dehors de nos frontières, aux États-Unis, mais aussi au Japon. Dans les premières années de la marque, j’ai également rencontré de nombreux musiciens qui ont influencé mon travail.

Le premier effet que j’ai fabriqué spécialement pour un artiste, c’était justement la Fuse Blower pour Chris Whitley. Il avait un son de distorsion que j’adorais dans le morceau « Narcotic Prayer » sur l’album Din of Ecstasy. En 2002, j’ai eu la chance de le rencontrer et de discuter avec lui.

Vous vous souvenez de votre premier client ?

Un dont je me souviens bien, c’est Laurent Ciron. C’était le guitariste d’un groupe Rouennais : les Dogs, un groupe légendaire à l’époque. Il m’avait pris une Fuse Blower, mon premier modèle.

Vous avez commencé de façon très artisanale la création de vos premiers effets, vous réalisiez tout vous-même ? Du schéma à la décoration finale ?

J’ai toujours travaillé de la même façon. Je commence par tracer mon schéma théorique sur papier et à faire mes calculs. Ensuite, je monte le circuit et je corrige les valeurs des composants selon le son que je veux obtenir au final.

Overtube et Mercer Box

J’écoute le résultat en prenant du recul : « il y a trop de basses, trop d’aiguës ou trop de distorsion » et je fais mes réglages. C’est une étape très importante. Un circuit soudé avec des composants ne réagit pas du tout de la même façon qu’une simulation ou qu’un montage sur plaque d’essai.

Les composants sont très importants, ils influent beaucoup sur le résultat sonore. Par exemple, les transistors au germanium qui sont dans la Mercer Box pourraient, théoriquement, êtres remplacés par des équivalents au silicium. Mais pour moi, le circuit ne fonctionne et ne répond pas de la même façon. La vraie raison derrière tout ça ? Je dois avouer que ça me dépasse, mais ça ne marche pas pour moi.

J’ai toujours une gamme d’effets « handmade » que je fabrique entièrement à la main. Je réalise ces modèles sur demande.

Mercer Box en version « handmade »

Est-ce que vous considérez les amplis ou les effets comme autant d’instruments de musique au même titre qu’une guitare ou qu’un piano ?

Oui, tout à fait. Le son qu’un effet ou qu’un ampli offre à un musicien est aussi important que le son de sa guitare. C’est un composant essentiel dans la musique amplifiée. Quand on écoute Jimi Hendrix, le matériel qu’il utilise est essentiel : une Strat, une Fuzz Face et un bon vieux Marshall.

Vous entretenez une forte relation avec les différents artistes qui utilisent vos effets, vous pouvez me parler de ceux qui vous ont marqué ?

Comme j’en parlais avant, j’adore travailler avec les artistes que j’aime. La liste est vraiment longue mais pour n’en citer que quelques-uns : Joe Bonamassa, Win Butler d’Arcade Fire, Laurent « Branco » du groupe Phoenix, Troy Van Leeuwen de Queens of The Stone Age, ou encore Steve Morse. Mais bien sûr le plus important reste pour moi Chris Whitley qui a malheureusement disparu il y a quelques années.

Parfois, je découvre via internet ou des vidéos que tel artiste ou groupe utilise mes effets. Ça été le cas pour MGMT, le guitariste de Robbie Williams ou encore le groupe Dinosaur Jr.

La Bat Fuzz est de retour, vous pouvez m’en parler ?

La nouvelle Bat Fuzz

Cette nouvelle version reprend le même schéma de la Bat Fuzz d’origine tout en utilisant un autre boîtier. Le son lui est vraiment le même.

C'est une distorsion pour le metal, inspirée par l'univers gothique de Batman et aussi un goût prononce pour la vieille Boss HM2 branchée dans un gros Hiwatt d'époque.

Je vais également sortir un nouveau modèle qui permettra de retrouver le son de Van Halen. On aura sous le pied un phasing et une distorsion qu’il sera possible de vraiment régler finement pour retrouver le fameux son « brown tone » de Van Halen. J’ai décidé de la baptiser : la « Bête Noire », un nom dans la langue de Molière donc !

Le fait de vendre en ligne est important pour vous ? Qu’est-ce qui vous a plu sur Reverb ?

C’est toujours gratifiant de vendre en direct. On a un contact et un retour direct du musicien, quand le client est content, on le sait. Certains aiment me proposer des modifications, que parfois, je réalise sur les modèles suivant.

Je suis venu sur Reverb pour vendre directement, mais aussi et surtout, car je suis collectionneur, j’ai de nombreux amplis et effets vintage. J’ai même une très grande collection, plus de cinq cent pédales vintage. C’est donc le lieu idéal pour moi pour vendre.

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