L’Itemm, une école pour luthier unique en Europe

Né au début des années 90 sous l'impulsion de l'Europe, l’Institut Technologique Européen des Métiers de la Musique (Itemm) a été construit sur une ancienne école d’accordeurs de pianos qui existait déjà sur Le Mans depuis la fin des années 70.

Depuis son ouverture, le lieu a accueilli de très nombreux élèves, dont certains attirés plus particulièrement par la branche lutherie guitare. Nous avons récemment rencontré Valentin Bringuier, responsable du pôle guitare de l'Itemm, qui nous a expliqué quel est le rôle de cette école quasi-unique.

Qu'est-ce qui rend l'Itemm unique ?

Dans le monde, il existe très peu d’écoles similaires à celle-ci. Ici, on forme à tous les métiers de la musique, dans un même lieu. Effectivement, il existe des écoles spécialisées dans la lutherie guitare, vent ou piano aux quatre coins du monde. Nous, nous avons vraiment une forme unique qui ne se retrouve que très rarement.

À l’Itemm, on retrouve une partie facture instrumentale où on forme des luthiers guitare, vent et piano, mais il y a aussi une section régisseur son, une dédiée au commerce. On aborde tous les aspects des métiers de la musique. Annuellement, ce sont plus de 220 élèves qui viennent se former ici.

Est-ce que vous pouvez me décrire la formation guitare qui est proposée à l’Itemm ?

C’est une formation qui est englobée dans la branche facture instrumentale et qui se déroule sur quatre années. On s’y forme à deux diplômes : un CAP sur deux ans en apprentissage, ou un an à temps plein et un BMA, exclusivement sur deux ans en apprentissage. Ce sont deux formations qui se déroulent en alternance avec une entreprise. Nous avons en général six à dix élèves par promotion sur la formation lutherie guitare, ce qui sur les deux ans de CAP et les deux ans de BMA représente une quarantaine d’élèves à l’année.

Que proposent les formations liées à la guitare ?

Les quatre années de formation s’articulent autour de deux diplômes : un CAP et BMA (brevet des métiers d’art. Nous avons fait un choix particulier ici. Notre CAP lutherie guitare n’est axé que sur la réparation et l’entretien. En général dans d’autres écoles de lutherie, on commence directement par la fabrication. Nous voulions être plus en accord avec la réalité économique de ce secteur : l’activité d’un luthier, c’est à 80 % aujourd’hui la réparation, l’entretien, le réglage et la modification de guitares qui constituent le parc existant. C’est à partir du BMA que nos apprentis sont formés à la fabrication.

Pour ce qui est du CAP, l’élève va apprendre à régler tout type de guitare, s’initier au travail du bois, mais aussi à l’électronique pour le câblage des électriques. On retrouve également des modules sur le frettage, la planification de frettes, les réparations structurelles comme le travail autour d’une tête cassée ou le décollement/recollage d’un chevalet sur une acoustique. C’est vraiment tout ce qui fait le quotidien d’un atelier de lutherie. Beaucoup de guitaristes ne savent pas que c’est l’essentiel du travail d’un luthier, ils pensent souvent que c’est une activité élitiste liée à des instruments très chers.

Le tout est complété par des cours tels que du dessin technique (papier et DAO), de l’organologie, de l’histoire de la musique, de l’art appliqué, de l’acoustique, de l’économie, de l’anglais et des maths appliqués à la musique.

Vous travaillez beaucoup en atelier, est-ce qu’il faut déjà avoir des connaissances dans le milieu du bois pour intégrer l’école ?

C’est bien sûr un plus, mais finalement, venir d’autres univers professionnels (commerce, logistique, design et autres métiers techniques/manuels) peut également servir pour se destiner au métier de luthier. L’élément fondamental, même si ça peut paraître convenu, est de s’investir totalement. Ce métier l’exige.

Y a-t-il une formation spécifique pour ceux qui sont plus attirés par les guitares électriques au niveau du BMA ?

Non, nos formations sont mixtes. En BMA, on aborde toujours l'aspect réparation, mais sur des interventions plus lourdes comme décoller une touche pour changer un truss-rod par exemple.

La partie fabrication aborde tout ce qui permet de fabriquer des guitares électriques ou acoustiques (travail machines, débit, finition contemporaine ou traditionnelle, incrustation de nacre, sculpture de manche, cintrage d’éclisses, marqueterie …)

Les apprentis travaillent également pendant 2 ans à la réalisation d’un projet personnel comme la conception d’outils, des réparations complexes ou la réalisation d’un ou plusieurs instruments. Ils choisissent souvent des problématiques à caractère acoustique en fabriquant plusieurs instruments en faisant varier des paramètres de fabrication pour en mesurer les conséquences sur l’instrument fini et profitent des acousticiens du pôle d’innovation de l’Itemm.

Quel est le parcours de vos élèves une fois la formation terminée ?

Certains sont embauchés dans les entreprises (magasins ou luthiers) où ils ont réalisé leurs apprentissages. D’autres sont embauchés dans les SAV des distributeurs d’instruments de musique. On peut citer des exemples comme Azema Musique à Montpellier, Steel Music à Toulon ou chez des luthiers plus traditionnels qui ont leurs ateliers un peu partout en France. Parfois, ils sont même directement embauchés par ces derniers.

Beaucoup arrivent à l’Itemm en ayant en tête l’envie d’ouvrir leur propre atelier. Au fil de la formation et du travail en apprentissage, ils se rendent compte de la réalité économique et il peut être au final très intéressant de débuter au sein d’un magasin de musique ou chez un luthier avant de se lancer dans le grand bain. Les envies évoluent avec les formations en tout cas.

Vous avez en tête des élèves qui vous ont marqués et qui sont maintenant des luthiers établis ?

Ces dernières années, nous avons eu des apprentis chez des luthiers comme Patrice Blanc, Christian Magdeleine, Sylvain Balestrieri, Fred Kopo, Hugo Cuvilliez, Morgan Briant, Bertrand Moguérou… La liste est longue ! J’aime bien l’histoire de Blandine Dolithé qui s’est associée à son ancien maître d’apprentissage, Mathieu Geoffroy pour créer l’excellent atelier Sideman à Caen. Je pourrais également parler de Romain Caseiro qui travailler à l’atelier d’Alexandre à Orsay ou de Tom Poirrier qui a été embauché récemment par Thomas Féjoz ou encore de Maja Guitare. De la même manière, la liste est longue, il est difficile de pouvoir parler de tout le monde, sans parler de ceux qui travaillent en magasin de musique.

La T-Bucket par Tao Guitars

Quelle est la guitare qui vous fait vraiment rêver ?

À chaque fois que j’ai eu l’occasion de voir les guitares fabriquées par John (encore un ancien de l’Itemm !) et Serge de Tao Guitars, j’ai toujours été impressionné par leur qualité. Frettage, design, conception et finition : tout est parfait et réalisé avec une incroyable finesse ! Plus récemment, j’ai pu essayer au Salon de la Belle Guitare à Montrouge une baritone fanned fret de Thomas Féjoz qui avait une sonorité tellement profonde et enivrante que j’en ai oublié le brouhaha ambiant !


Toutes les photos de cet article sont de Cédric Charrier et Valentin Bringuier, elles sont la propriété de L'Itemm.
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